6h30. Je me réveille, spontanément. C’est parti pour une heure de yoga, ma routine quotidienne 8h. Je me recouche. Je me blottis contre Monsieur, nous restons lovés pendant une heure. Un bon shoot d’ocytocine. Ca tombe bien, il parait que c’est l’hormone de la confiance 9h30. Petit déj tranquille. Douche. longue. Laisser couler les tensions qui pourraient guetter. Brushing, on va essayer de faire ça bien. Je vais être en gros plan à la caméra pendant quelques heures quand même… 11h. Pomo. Je relis ma présentation à haute voix une dernière fois ; je parcours les réponses préparées aux questions des rapporteurs. Je suis connectée sur Pomoskype avec les doctorants avec qui j’ai travaillé tant d’heures, de jours, de mois ; c’est tellement familier, ça met un peu de « normal » dans cette journée extraordinaire, et ça fait un bien fou. Si je soutenais en présentiel, je serais dans un lieu inconnu, froid et austère. Là, je suis dans mon cocon, dans ma bulle. Finalement, soutenir à distance, ça a aussi des bons côtés. 12h30. Déjeuner avec ma sœur, qu’elle a préparé. je sens la tension monter. On parle de tout et de rien. Tic tac tic tac. On rigole. Enfin, de mon côté, c’est plutôt des rires nerveux. Mais ça fait du bien. 13h. Je m’habille, me maquille. Je n’avais pas voulu le faire le matin, trop peur de pleurer ce matin, de me tacher en mangeant ! Je respire. Je prépare mes réserves d’eau. Agir. Etre ancrée dans le concrêt et me mettre dans ma bulle. Je me sens plutôt tranquille finalement. Ca me fait presque bizarre. 13h20. C’est parti pour 20 minutes de méditation guidée avec Petit Bambou. Je choisis une pour « sourire à l’anxiété ». Je me dis que même si je ne suis pas "anxieuse", il y a un petit peu de tension et d’enjeu quand même dans les heures à venir !!! Donc aborder ce qui vient avec le sourire, ça me semble une bonne idée. 13h45. Je me connecte, on vérifie que tout fonctionne, que je peux diffuser. De mon côté, tout va bien. Mais un membre du jury n’arrive pas à se connecter, deux ont des problèmes de son. Le ou la présidente n’est pas encore élu(e). Bon. On ne commencera pas à l’heure, ça c’est sûr. Je me déconnecte en attendant qu’ils règlent les problèmes techniques et choisissent qui présidera. Pipi. J'ai bien mon script, mes réponses aux questions, ma réserve d'eau. J'ancre mes pieds au sol. Un tour sur le tchat de la diffusion youtube, waouh, c'est chouette de voir les gens qui sont là ! Même des gens que je ne connais pas dis donc. Mais ça me sort de ma bulle. Je coupe. 14h. J’inspire. J’expire. Je souris. J’inspire. J’expire. Je souris. Ad libitum. Un tour rapide sur le tchat youtube pour prévenir du léger retard, je vois les messages de soutien et l’enthousiasme, ça fait chaud au cœur mais c’est déstabilisant en même temps, tant d’attention. Je reste dans ma bulle. je respire, pieds au sol. 14h10. Un message à ma directrice pour savoir si tous les membres sont connectés. Oui. Ca ne devrait plus tarder à commencer. Attente. Temps suspendu. Accepter ce qui est. 14h20. C’est parti ! Je rejoins le jury. Je découvre qui préside. Surprise, ce n’est pas la personne à laquelle je m’attendais d’après les derniers échanges avec ma directrice. Adaptation. Encore et toujours. Et je démarre ma présentation. 14h25. Faux départ. Un membre du jury fait un signe de time out. Je m’arrête. La diffusion youtube n’a pas commencé alors qu'il y a 90 personnes en attente. Uff. Intervention du technicien pour corriger. Attendre. Encore. Rester concentrée. Respirer. Accepter les aléas. 14h30. Cette fois c’est parti. 14h50. Je finis ma présentation, qui s’est déroulée comme je l’avais répétée, je suis contente. Le premier rapporteur liste ses questions, dans le même ordre que dans son rapport. Trop bien, j’ai préparé par écrit toutes les réponses, je n’ai qu’à les reprendre dans l’ordre en sautant celles qu’il a finalement omises. On dirait que j’improvise mes réponses, alors que tout est là sous mes yeux. Vient le tour du deuxième rapporteur, là les questions sont dans un ordre différent, il les pose une par une donc je ne peux pas organiser mes réponses, il les tourne chaque fois différemment du rapport donc mes réponses toutes prêtes ne marchent pas. Mais les réponses s’enchaînent, je ne me pose pas de questions sur comment je réponds. Je sais que je connais mon sujet et mes choix, alors je me laisse parler presque automatiquement. Je ne sais pas ce que je réponds. 15h50. Pause. Aaaaarrghhh ! Là je réalise ce qui est en train de se passer, mon pouls s’emballe, mon cerveau aussi. Pipi. Reprendre de l’eau. Respirer. Revenir dans ma bulle. Je reviens en place. J’inspire. J’expire. Encore. Encore. Revenir à l’état de « flow » dans lequel j’étais. 16h. C’est parti pour les commentaires et questions des trois suffragant.e.s. Des retours très positifs. Surtout des options de prolongement, ou des clarifications, rien qui me remette en question. J’ai presque l’impression d’échanger entre pairs. C’est stimulant et gratifiant. Je prends plaisir !! Puis un commentaire de mon tuteur, et le dernier mot pour ma directrice. Qui, après avoir remercié tout le monde comme le veut la tradition, revient sur l’expérience de m’avoir accompagnée et finit en listant mes qualités. Je ne m’y attendais pas. Waouh. Je… euh… waouh… Ouh là, ce n’est pas le moment de pleurer. Donc on reste concentré, ancré, on respire ! 17h40. Le jury se retire pour délibérer. Enfin, techniquement, c’est moi qui me retire de la visioconférence. Moment hors du temps. Je sais que je vais avoir le titre, il n’y aura pas de surprise. Je sais que ça y est, ces quatre ans de thèse sont FI-NIS ! Mais non, je ne peux pas encore lâcher, il faut attendre. Mon copain veut me prendre dans ses bras, je ne peux pas, sinon je vais craquer, et ce n'est pas encore le moment. Toute la tension cumulée pendant 4 ans semble vouloir sortir d’un coup, je suis une pile électrique. Tenir. Tenir. Cette attente file en un éclair et semble interminable simultanément. 18h05. J’ai officiellement le titre de Docteure en gestion. Merci, blablabla. C'est formel. C'est froid. C'est distant. Surtout que le président de mon jury ne décroche jamais un sourire même quand il est ravi. Ca semble tellement décalé pour un moment d'une telle intensité. J'ai envie de pleurer de rire de les serrer dans mes bras de sauter de danser. Je remercie poliment. 18h08. On raccroche. Je huuuuuuuuurle ! Je ris. Je fonds dans les bras de mes proches. Je m’écroule sur ma chaise. Les larmes sortent. Je tremble de partout. Ca y est !!!!! Je ne réalise pas. J'entends un "pop" et une coupe de Champagne arrive dans ma main. 18h10 : J’ouvre un lien zoom pour voir ceux qui étaient là, j’échange avec mon équipe de pomoskype, des amis, quelques autres personnes, puis ma famille. Merveille de la technologie. Moi qui étais si frustrée de ne pas soutenir en présentiel, j’ai finalement eu bien plus de monde avec moi que je n’aurais imaginé. Près de 90 personnes ont suivi ma présentation, 47 sont restées jusqu’à la fin d’après youtube, je n’en reviens pas. Je suis en mini comité physique pour fêter cela, confinement oblige, mais je sens plein de monde avec moi et le champagne, les petits fours, la joie et les rires fusent. Je découvre les dizaines de message de soutien puis de félicitations reçus pendant l’après-midi. Je… pffff…. comment dire… ne rien dire… vivre le moment…. J’oscille entre être avec mes proches, être au téléphone avec celles et ceux qui m’appellent, être avec les messages qui me parviennent et être avec moi-même, ce qui vient de se passer. C’est de la joie pure. Je découvre que mon groupe pomoskype a tout commenté en live pendant les 4h que cela a duré, je lis tout le fil, j’en pleure et j’en ris, je ne peux plus m’arrêter, quel soutien, quelle intensité et quelle joie partagées, c’est incroyable ce que nous avons créé comme relations. Je l'ai fait. je suis allée au bout. Malgré tous les aleas. Je l'ai fait. Je l'ai fait. Je perds la notion du temps, de l'espace. Je suis là et pas là en même temps. Minuit, je me couche. Tellement tellement tellement contente. 1h. Je ne dors toujours pas. Je revis plein de moments de la soutenance, non pas pour les refaire en me disant que j’aurais dû répondre ceci ou cela, non, simplement en écho, je me délecte. 2h. je ne dors toujours pas. Je continue de revivre tous ces moments. 2h30. Je me relève. Je relis le fil pomoskype ; je découvre de nouveaux messages reçus. Je me sens reliée à plein de monde. Je mesure la réalisation. Ou pas. 3h. Je ferme les yeux et m'endors. C'est fini. Vraiment ?
0 Commentaires
Laisser un réponse. |
Autrice
Doctorante en fin de thèse quand je lance ce blog, j'ai mis à profit mes 15 années d'expérience professionnelle et de développement personnel préalables pour vivre au mieux cette aventure pour moi et des collègues. Ces dernier.e.s m'ont incitée à partager plus largement, et Puissant.e.s Doctorant.e.s est né ! Archives
Juillet 2023
Catégories
Tous
|